Z'humeurs : C'est le printemps et le retour du kéké

La Rédaction a écrit: C'est quoi le signe même du kéké pour vous ?
La Rédac vous donne son avis sur la question

Loic a écrit: short, baskets, pas de blouson, pas de gants...

Hervé a écrit:Le kéké est déjà sorti, j'en ai vu un la semaine dernière sur la corniche à Sète... Tee-shirt, jean, baskets et un bon wheeling d'une centaine de mètres en doublant deux bagnoles. Il va prendre le relais de celui de l'an dernier... qui est mort à l'automne !!

Kéké a écrit:
Je n'aurais jamais dû faire le caprice d'une néo-classic 1200 black sur laquelle le moindre chrome comme la moindre tache d'eau se fait remarquer. Avant, sur mes GSA, je courrais 20.000km à 25.000 km par an dans les Alpes, au Stelvio, en Europe de l'Est, Lettonie, Espagne, Portugal, Italie, Montenegro, Serbie, Turquie... La moto était 90% du temps, dans son jus. Dans de la merde on dira.
Aujourd'hui, je la rentre propre dans le salon. Faut pas de boue, pas d'huile.

Sortie du week-end. Restau ou café. Jamais je ne serais allé au Maroc car je crains trop le soleil et les hautes températures qui m'ôtent tout plaisir. Pas les plages non plus où j'attrape des acouphènes que je ne ressens pas en altitude. Moto c'est montagne, virolets...
Riper en plein hiver dans la Corniche Cévenole ou monter au col de Vars le 5 janvier ne me faisaient pas peur il y a quelques années... Heu ! Si, j'avais peur, mais j'aimais. Aujourd'hui je vis kéké...

J'ai adoré rouler en tee-shirt, short et cheveux au vent sur les chemins de contrebandiers ou de douaniers bretons, en Serbie, en Albanie, sur les pistes des plateaux du Montenegro. Ça me rappelais l'ivresse d'une époque où j'accrochais le casque à l'avant bras pour m'en servir de panier à provision. Ce n'était pas encore interdit. Quand ça l'est devenu, j'étais encore plusieurs centaines à 50-70 km/h max dans la grimpette de l'Iseran, en 125 K4 vieil or et crème pour un Chamois, à braver l'altitude et la marée-chaussée ; ambiance de klaxons et de gaz dans les tunnels et jusqu'à à la chapelle ou un folklorique curé bénissait nos ferrailles. Ce n'est plus possible. On nous a maté, on a maté nos vices. Pas au sens de mater-regarder. Pas matamore. Pourtant, comme Steeve McQueen, j'ai fumé la pipe en roulant sur un GT500 Suzuki 2T à réservoir d'huile séparé pour le mélange ; L'acteur roulait en clopant et sans casque. Il est mort d'un cancer, pas d'un coup de corne ni d'un levier de frein. La pelote de tabac en braises est sortie du fourneau de ma pipe pour rebondir sur ma joue et s'échapper sur le bitume. J'aurais pu mettre le feu à la nationale. Je n'ai plus recommencé.

Voilà 53 ans déjà. Certains appelleraient ça miracle, diraient que la moto c'est sérieux, d'ange heureux. Ne plus jouer. Au mieux, ça fait partie du paraitre consumériste bourgeois et même plus bo-bo qui affiche son standing. Prendre le rond-point en restant sur la partie droite. Ne pas couper. En XL250 Honda, c'était en 1976, j'avais labouré la butte d'un rond point fraîchement planté de jonquilles et qui offrait un superbe franchissement Avenue De Lattre de Tassigny à Valence. Les jonquilles n'étaient pas encore l'apanage de la lutte contre le cancer et les ronds points pas encore une manie sécuritaire européenne. Prescription. Cette piste n'était pas loin de chez moi. Le film n'était plus Continental Circus, mais, Number One. Je ne verrai Easy Rider et l'Équipée sauvage qu'en DVD, bien plus tard.

Il y a eu des gamelles mais pas trop. Pas trop dure non plus. Si j'échappe à un conflit nucléaire, c'est que j'aurais eu de la chance dans ma vie. Je reste entier à plus de 69 ans. J'ai toujours dit qu'il fallait mesurer le risque. Un virage à droite est plus dangereux qu'à gauche car à la corde, à droite, on voit moins loin. En fait, j'ai dû pas mal limiter les risques. En 69 j'avais une Honda SS50M. Une tasse à café sans pédales qui montait à 90 km/h compteur, permis A1, classe vélomoteur. Ma grand mère m'avait confectionné un pompon rouge à la clef de contact pour mieux la repérer car parfois elle sautait de ma poche quand je m'éloignais d'une cinquantaine de bornes du domicile. Gaité ridicule ? Bof ! À Toulon et à Brest il y a des marins qu'ont le même sur le bachi pour éviter de se taper la tête au plafond des coursives.

Le vrai motard doit consommer sécure, ne pas prendre de risque. La sécurité avant tout, elle est sociale. On devrait tous avoir un abri atomique sous la maison, un groupe électrogène et une chambre froide remplie de provisions, des masques. Et puis, on s'est habitué depuis quelques temps. Il y en a qui vont même dire que le Corona a été programmé pour qu'on sache se défendre contre le gaz Sarin russe. Prévoir de l'eau pour les étés de sècheresse, des glaçons pour le pastis. La banquise fond. Prévoir des armes de poing, d'épaule et des mortiers en cas d'invasion. Prévoir un entrainement aussi, physique, mental. La moto en ferait partie. Voir la Grande Évasion. Prévoir des films de cul, si jamais les Tchétchènes ou les Mongols embarquaient nos Sabines. En 40, des Mongols, justement avaient violé vers Annonay. La rumeur insistait sur ces étrangetés d'étranger...

La côte du Pin et Vernoux en Vivarais présentait des routes verglacées voire enneigées l'hiver. Agostini, jeune, tournait l'hiver autour du Lac de Côme. Moi j'avais mon circuit chronométré pour le matin de Noël : Granges-les-Valence, Le Pin, St Romain, Granges. À donf' ; il y a presque personne sur le circuit car les gens récupèrent de la dinde du réveillon et de leur messe de minuit. Verglas, trous, graviers... Aux hivernales de Vernoux, j'entortillais une corde de chanvre autour du pneu pour cramponner la neige et roulais en faisant glisser mes boots de chaque côté de la bécane pour la tenir verticale. Mon 50 a fini contre la calandre d'une 404 pick-up sur le pont d'Aouste parce que j'avais beau avoir retaillé au tournevis le pneu AR, ça n'a pas suffi sur le goudron fondu.

La visière relevé du casque aviation renvoie les guêpes dans le tee-shirt. Sur la Bonnie, le flux d'air les fait passer dans les manchons du short. Cet hiver les rhumatismes m'ont tenu à l'intérieur. Début décembre, bien qu'en costume 3 couches de protection, une balade au Ventoux a réveillé une arthrose de hanche et de chevilles qui me fait boiter jusqu'à ces derniers temps. Du coup, plutôt que faire de la moto j'ai fait la moto. Feux additionnels, klaxon 130 db à 2 tons, horloge à aiguilles et thermomètre noirs cerclés de chrome au cockpit. J'oublie l'Ukraine que j'ai longé avec envie après ma visite du Cimetière joyeux de Săpânța en Roumanie. Je m'étais promis de la parcourir.

Il y en a qui rendent leur moto plus dans le goût pré-dicté du style qu'elle doit avoir. Orthodoxie. Cul coupé à la mode café racer, suppression des carters, de la selle remplacée par une couverture. C'est plus style. Plus motard, ni crevard, ni blaireau. Moi, je n'ai rien compris. Je transforme Bonnie en Boing, en frégate ou en porte-avion. Non, pas porte-avion. En ces temps j'évite l'allusion militaire.

Depuis quelques jours, je ressors. Il fait beau. Je n'ai plus trop de douleurs d'arthrose. Visière relevée, j'ai déclenché une allergie. P*** de pollens ! Et en plus, hier soir, il y a des moucherons qui m'ont pourri le phare ! Heureusement j'ai des lingettes de kéké dans les fontes alu...

Hervé a écrit:Le kéké est déjà sorti, j'en ai vu un la semaine dernière sur la corniche à Sète... Tee-shirt, jean, baskets et un bon wheeling d'une centaine de mètres en doublant deux bagnoles. Il va prendre le relais de celui de l'an dernier... qui est mort à l'automne !!